NOTICE HISTORIQUE

 

CHAPELLE N.-D. DE BONNE GARDE

 

 

 

(paroisse St Jacques)

 

Par l’Abbé P. GREGOIRE

NANTES

 

Imprimerie BOURGEOIS, rue St Clément, 57

(1888)

 

Nantes, le 9 Juillet 1888

  

 

                        Monsieur l’Abbé,

  

Je vous autorise volontiers à faire imprimer votre Notice sur la Chapelle de Notre Dame de Bonne-Garde.

 

Cette Notice, au point de vue historique, offre un véritable intérêt. Elle est d’ailleurs de nature à rendre de plus en plus chère aux fidèles la dévotion envers la VIERGE douce et puissante qui du haut du Ciel nous regarde et nous garde avec cette tendresse et cette sollicitude que lui inspire sans cesse son cœur de Mère.

 

Cet opuscule, Monsieur l’Abbé, n’est, me dites-vous, que la première page d’un livre beaucoup plus important et qui aurait pour titre : Le Culte de la Très Sainte Vierge dans le diocèse de Nantes. Que  Dieu bénisse votre pieux dessein et qu’il nous donne à tous la joie de la voir un jour et bientôt heureusement réalisé.

 

Agréer, Monsieur l’Abbé, avec mes félicitations, l’assurance de mon affectueux dévouement en Notre Seigneur.

 

 

                                                                                 JULES, Evêque de Nantes.

 

NOTICE HISTORIQUE

Sur la

CHAPELLE NOTRE DAME DE BONNE-GARDE

**********

 

A la porte de Nantes, sur le grand chemin de Clisson, comme une sentinelle avancée qui garde la cité, s’élève une élégante chapelle, bâtie en l’honneur de la Très Sainte Vierge.

Elle est située à quelques cents mètres de l’antique et intéressante église Saint-Jacques. 

C’est grâce à ce sanctuaire vénéré que la dévotion à Marie s’est toujours maintenue dans la paroisse. Il semble même que la Reine Des Cieux ait pris possession de ce petit coin de terre, où elle est invoquée depuis si longtemps sous les doux noms de N.-D. de Vie, N.-D. de Bon Secours,

 N.-D. du Rosaire,  N.-D. de Bonne-Garde, N.-D. de Bon-Conseil, N.-D. de Bon-Espoir et N.-D. de l’Annonciation.

Antérieurement à la Révolution existait dans l’église priorale des Bénédictins, (aujourd’hui paroissiale), le siège d’une célèbre confrérie qui comptait en 1790 plus de deux mille membres, répandus dans toute la ville.

Dans la chapelle du Nord on remarque une Vierge d’une expression très saisissante, restaurée il y a quelques années et qui serait (cela pourrait s’établir historiquement par les documents et la tradition) la véritable statue de N.-D. de Bon-Secours : sauvée du vandalisme révolutionnaire par M. GUIBERT, curé intrus de Sainte-Croix et devenu curé légitime de Saint-Jacques, elle aurait été placée par celui-ci dans sa nouvelle église paroissiale.

La confrérie du Rosaire, qui remplace celle dont il vient d’être fait mention dans la note, a été canoniquement érigée en 1823 par Mgr DE GUERINES. L’autel est sous ce vocable comme sous celui de Bonne -Vie.

Le vénérable M. DURAND, dont la mémoire est toujours en bénédiction, a fait plus que personne pour le développement du culte de la Très Sainte Vierge parmi les fidèles de St Jacques. C’est à lui que revient l’honneur d’avoir relevé de ses ruines le sanctuaire de Bonne-Garde ; c’est par ses soins qu’on a placé sur le chemin de Vertou un petit monument en l’honneur de N.-D. de Bon-Conseil et un autre à Sèvres, sous celui de N.-D. de Bon-Espoir.

Dans la partie rurale de la paroisse existe un oratoire, propriété de la Fabrique, où l’on acquitte une fondation de messes et dont l’autel est dédié au mystère de l’Annonciation.

Ces sanctuaires, ces autels, ces statues et ces confréries sont autant de signes de dévotion et autant de titres à la protection spéciale de Marie pour la paroisse St-Jacques.

Le but de cette petite Notice, que nous consacrons à la Chapelle Notre Dame de Bonne-Garde, sera sûrement atteint, si ces quelques pages contribuent à affermir et à augmenter la piété des habitants de St Jacques pour leur bonne et puissante Patronne. Nous publions cet opuscule à l’heure où, selon l’ancien usage de la paroisse, on pourra reprendre ces processions , si populaires et tant aimées, qui se faisaient de l’église à la chapelle, chaque premier dimanche du mois, à l’issue des vêpres.

Il est toujours difficile d’indiquer une date précise à ces monuments que nous ont légués les âges de foi : l’origine des institutions et des pratiques religieuses les plus vénérables restent enveloppées d’un nuage mystérieux. C’est ainsi, qu’après des recherches consciencieuses, on n’a pu établir historiquement la fondation des sanctuaires les plus illustres que la piété des siècles passés ont élevés autour de notre vieille cité nantaises, comme ceux de Miséricorde, de Toutes-Aides et de Bon-Secours. Les documents faisant défaut, on s’est appuyé sur le caractère architectural des constructions : ce qui n’a pas toujours satisfait la critique moderne, si susceptible et si exigeante.

En particulier, notre vieille église St-Jacques est restée, jusqu’à ce jour, un problème que les données de l’histoire n’ont pas encore résolu. On y lit, il est vrai, au frontispice de la grande arcade du chœur, la date en chiffres arabes de 1180 ; mais justice a été faite de cette date apocryphe que l’architecte, M. NAUD, a cru bon de faire graver lui-même, à la suite de la restauration. Le style, qui la rend si originale et si digne d’intérêt, permet de la classer parmi les édifices de l’époque de transition, c’est-à-dire vers la fin du XIIe siècle. La vraie date est celle que l’on découvre enchevêtrée sous les acanthes d’un chapiteau dans l’abside du Nord. Voici le fac-similé :

« XII – AIA »

Mais qui pourra déchiffrer cette énigme ? On a disserté sur cette inscription, et le champ est encore ouvert aux archéologues – Adhuc sub judice lis est.- De quelque manière qu’on l’interprète, on est obligé de placer la fondation dans les premières années du XIIIe siècle.

La Chapelle de Bonne-Garde, dont nous étudions l’histoire, a des origines connues, que la tradition et les documents indiquent d’une manière telle qu’il ne nous reste plus de doute sur son établissement.

On rapporte qu’au milieu du XVIIe siècle « des personnes aperçurent un soir, resplendir au milieu d’une clarté lumineuse, une petite statue de la Très Sainte-Vierge. Leur étonnement et leur joie sont extrêmes ! Elles s’empressent de se saisir de la merveilleuse statue et de la porter chez elles comme un gage de bénédictions célestes. Mais nouveau sujet de surprise et à la fois de grande tristesse : l’objet vénéré ne se trouve plus le lendemain au lieu où on l’a placé veille. On le recherche inutilement dans toute la maison : il n’y est plus. Frappés de plus en plus d’un évènement aussi extraordinaire, les premiers témoins se hâtent d’en donner connaissance aux Bénédictins du Prieuré de Pirmil, sur le fief desquels se trouvait la miraculeuse invention. Le prodige se renouvela dans les mêmes circonstances. Par l’ordre des Religieux, la statue est transportée dans leur église ; mais c’est encore en vain, l’image de Marie se retrouve à l’endroit même où on l’a vue pour la première fois. A ces signes multipliés, l’on reconnaît que la Sainte Vierge veut être honorée dans le lieu où s’était manifestée la merveille. Une petite grotte reçut la statue, et dès ce jour on vit affluer les pieux pèlerins. »

Quelques années plus tard, grâce aux aumônes des fidèles et principalement aux largesses du maréchal de la Meilleraye et avec l’autorisation du R.P. Prieur et de l’Ordinaire, une modeste chapelle avait remplacé le premier monument. C’est le 4 novembre 1657 que l’on inaugura le nouveau sanctuaire.

Nous en constatons l’existence par le procès-verbal de la visite archidiaconale du Doyenné de Clisson :

« Il a esté à l’endroit déclaré que la chappelle a été bastie en l’an mil six cent cinquante-sept par les soins de Sœur Marie, appelée de Bonne-Garde et des Coquin, ses parents, des charités et aumônes de diverses personnes et entr’autres de feu seigneur maréchal de la Meilleraye et du consentement du sieur Bazin, lors prieur de Primil, en le fief du quel elle est et par permission de Monseigneur de Beauveau, lors évesque de Nantes.

En laquelle après avoir fait nos prières à basse voix, nous l’aurions trouvée en bonne estat et que le grand autel dédié à la Sainte Vierge estoit très propre et bien paré et qu’il y avoit dessus une

petite Nostre-Dame d’argent et au devant deux lampes aussi d’ argent, et qu’il y avoit un second autel contre la muraille du costé droit en entrant, dédié à la Très Sainte Trinité, aussi fort propre et bien orné.

A l’endroit de la ditte visite le sieur Recteur de Saint-Sébastien a déclaré qu’il avoit esté faict plusieurs dons à la ditte chappelle et qu’il en étoit faict continuellement, des quels on avoit acheté divers ornements, dont la pluspart estoit entre les mains de la ditte Soeur Marie ; laquelle s’éstant trouvée à la ditte visite nous auroit faict voir divers ornements fort propres tant pour la sainte messe que pour parer les autels, et deux beaux calices et plusieurs cierges blancs qu’elle auroit dit avoir esté donnés en offrandes et nous auroit déclaré que, depuis les deffen

Ses faictes d’exposer le Très Saint Sacrement en les chappelles particulières, elle avoit mis entre les mains de madame de Crévaly un grand et un petit cyboire, un beau soleil et un encensoir avec la navette, le tout d’ argent, pour estre devenu inutile depuis, les dittes deffenses, et nous a aussi apparu un petit livre de papier blanc in-quarto en le quel sont escrits la pluspart de tous les dits meubles et présens faicts en la ditte chappelle et par qui et à quels desseins ils ont esté faicts… »

Tel est ce document officiel, portant la date du 4 mai 1684. A cause de son importance historique, nous en avons conservé scrupuleusement le style et la forme.

Cette sainte fille, dont la Providence a bien voulu se servir pour l’accomplissement de ses volontés, était une pieuse personne, vivant sous la règle du Tiers-Ordre et se livrant aux œuvres miséricorde et particulièrement aux soins des malades. On l’appelait pour cela Marie de Bonne-Garde, et c’est ainsi qu’on donna à sa chapelle le vocable de Notre-Dame de Bonne-Garde.

La chapelle était située à l’endroit même de l’invention miraculeuse, au carrefour formé par la rencontre des chemins de St Sébastien et de Clisson, dans un lieu désert et inhabité.

La construction actuelle occupe à peu près le même emplacement.

Ce qui rendit célèbre et fréquenté le sanctuaire d Marie, ce ne fut pas les riches dons dont il est fait mention dans la pièce précitée, mais plutôt l’histoire traditionnelle de son origine, la piété des fidèles et l’éclat des bienfaits qu’on y reçut.

Une tendre confiance en la protection de Notre-Dame de Bonne-Garde attacha dès le commencement à son culte tous les cœurs croyants et pieux. Les pèlerins affluaient de la ville et la campagne. Les malades et les infirmes, aussi bien que les pauvres pécheurs, se trouvaient réunis dans la même prière, les uns pour demander la santé et la guérison, les autres pour implorer le pardon de leurs fautes. On l’invoquait aussi spécialement contre le péril d’une mort subite. Que de marins, avant de s’embarquer sur la mer orageuse, sont venus confier à Marie la garde de leurs personnes ! On y arrivait des îles de Rezé et des bords de la Loire. Au retour d’un voyage accompli, à la suite d’une navigation heureuse, les matelots reconnaissants aimaient à suspendre aux murailles et à la voûte du béni sanctuaire de nombreux ex-voto, témoignages de leur gratitude et de leur foi. De tous ces signes de dévotion qui étaient autrefois le plus bel ornement de la chapelle, il n’est resté qu’un tableau que l’on voit encore aujourd’hui et un navire de guerre qui n’y figure plus depuis ces dernières années.

De pieux enfants y consacrèrent plus d’une fois l’innocence de leur jeune âge. Là ils recevaient la bénédiction de leur Mère du ciel. Au soir de la cérémonie de première communion, il s venaient ensemble se consacrer solennellement.

De nombreux pèlerinages arrivaient des paroisses voisines. Saint Sébastien se faisait un devoir sacré d’apporter chaque année à l’humble sanctuaire ses offrandes et ses prières : cette coutume subsista même jusqu’à ces derniers temps ; il n’y a que quelques années seulement que cette paroisse a rompu avec ses traditions.

Ce qui a aussi entretenu la dévotion dans cette chapelle, c’est qu’une Confrérie y a été établie dès l’origine en l’honneur de la Très Sainte Trinité. Les membres étaient obligés de faire célébrer une messe basse à l’autel de la Confrérie à l’issue de la messe paroissiale et une autre tous les premiers jeudis de chaque mois. Une ordonnance du grand-vicaire les avait dépossédés du privilège de l’exposition du Saint-Sacrement aux fêtes de la Trinité, de la Nativité et de la Présentation de la Sainte-Vierge, de Sainte Anne et de Sainte Barbe.

Cette Confrérie, gouvernée par deux prévôts, un ecclésiastique et un laïque, s’est maintenue simultanément avec celle de Bonne-Vie jusqu’à la révolution.

Un desservant a été attaché à la chapelle depuis sa fondation jusqu’à la constitution civile du clergé ; le dernier fut M. Nicolas Rethières, né à Saint-Sébastien et ancien vicaire d’Aigrefeuille.

Chaque soir à l’heure de l’Angelus, on aimait à se réunir aux pieds de Marie, la bonne Mère et la fidèle Gardienne de ses enfants. Là, un saint personnage, dont le nom n’est pas encore oublié, M. Pellerin, présidait à la récitation du chapelet et au chant du cantique.

Il a fallu la main sacrilège de la révolution pour fermer les portes de ce pieux sanctuaire et en interdire l’entrée aux dévoués serviteurs de Marie.

Pour obéir aux décrets de l’Assemblée nationale, on inventoria les meubles et ornements de la chapelle :

17             chasubles, 5 dalmatiques, 2 confessionnaux, une chaire.

La statuette de la Vierge, en argent, ainsi que les vases sacrés, si nombreux et si riches, furent envoyés à la Monnaie.

La chapelle fut vendue nationalement pour 150 livres.

      Ce n’est cependant que sous la Terreur que le pillage fut accompli. Un des soldats, pour lesquels on avait transformé la chapelle en corps-de-garde, voulut un jour mettre au feu l’antique statue de la Madonne : elle n’échappa à l’impiété que par miracle. La tradition locale rapporte qu’un brave habitant du quartier parvint à persuader le sacrilège de ne pas exécuter son dessein criminel. La tempête révolutionnaire apaisée, le sauveur de la statue la remit aux mains de M. Guibert qui la plaça à l’endroit qu’elle occupait autrefois ; elle y demeura jusqu’à la reconstruction de la chapelle. A cette époque on fit sculpter par Grootaers une nouvelle statue, d’un plus grand mérite sans doute au point de vue artistique, mais moins digne de vénération que celle au pied de laquelle les générations s’étaient humblement agenouillées. Elle occupa un coin de la chapelle pendant de longues années, et dernièrement on crut bon de la reléguer dans une dépendance de la chapelle : c’est là que par bonheur nous l’avons découverte.

Malgré les mutilations, signes du danger qu’elle a couru, elle porte encore son cachet d’originalité et d’antiquité. La Vierge presse encore contre son sein le divin Enfant qui entoure le cou de sa Mère dans un mouvement d’effroi et de crainte ; la main droite devait tenir un sceptre. Voilà bien la vraie Dame de Bonne-Garde qui défend et protège ceux qui se confient à son puissant secours. Elle est sculptée en bois dur ; mais malheureusement la finesse du ciseau qui l’a taillée disparaît sous plusieurs couches superposées de plâtre et de peintures grossières. Une restauration intelligente lui a rendu son expression naïve.

Rien de remarquable ne s’offrait à l’extérieur de la vieille chapelle que dominait une petite flèche en aiguille. Si l’on y pénétrait, on était frappé par un sujet à grand effet, suspendu à la voûte et qui couronnait autrefois le retable de l’autel principal. Le ciel entrouvert laissait voir le Père éternel, entouré d’une gloire rayonnante et jetant des regards de complaisance sur Marie, la gardienne de son Verbe incarné ; à gauche l’Esprit-Saint descendant sur son Epouse pour l’inonder de sa grâce ; puis une troupe d’anges formant cercle autour des divines Personnes et portant emprunte sur leur visage une joie mêlée de ravissement. Cet ouvrage était sans doute un don de la confrérie de la Très Sainte Trinité, qui tenait ses réunions dans la chapelle et y faisait acquitter les fondations.

Voilà tout ce qui restait des splendeurs et des richesses dont le Révolution avait dépouillé le vénéré sanctuaire de Bonne-Garde.

Quand le saint M. Durand arriva à St-Jacques comme curé, ce qui consola son cœur de prêtre et le remplit de douces espérances, ce fut d’apprendre que la paroisse avait le bonheur de posséder un sanctuaire dédié à la Sainte Vierge. Oh ! comme il aimait Celle qu’il appelait la trésorière, la dispensatrice des faveurs divines ! Il disait à qui voulait l’entendre qu’il obtenait tout du ciel par Marie. Quelques mois à peine après son installation, il prescrivit une neuvaine à Bonne-Garde, pour faire cesser une grande sécheresse qui désolait la campagne ; dans la semaine suivante, sa foi était récompensée par une pluie bienfaisante. Un peu plus tard il y eut un grand débordement des eaux de la Loire et de la Sèvre : le pieux serviteur de Marie invoqua N.-D. de Bonne-Garde ; les pluies cessèrent, et c’est en cette circonstance qu’il écrit dans ses notes à la louange de sa bonne Mère : « Marie que nous avons invoquée a prié pour nous. » En 1854, le choléra, on s’en souvient, sévissait à Nantes ; aussitôt M. Durand ordonna une neuvaine pour que la paroisse fut préservée du fléau qui faisait beaucoup de victimes dans le quartier des ponts. Sa confiance ne fut point encore déçue cette fois.

La vieille chapelle menaçait ruines, et l’on parlait déjà de la raser pour rectifier l’alignement de la route de Clisson. La pensée de la voir disparaître pour jamais navrait son cœur. Au pied de la statue de Bonne-Garde, il conçut le projet hardi d’une reconstruction. Mais comment arriver à ce rétablissement, dans une paroisse qui comptait si peu de gens aisés ? Rien n’est impossible au croyant. En 1855, avec Marie, il se met à l’œuvre, organise une souscription « qui, dit-il, produisit des résultats inattendus ». Trois ans s’étaient à peine écoulés, qu’au mois de juillet il eut le bonheur d’inaugurer sa chère chapelle. Construite dans le style gothique par M. Bourgerel, elle est élégante et gracieuse dans sa simplicité. Un campanile élancé ne tarda pas à couronner l’ouvrage. On ne négligea rien pour la rendre magnifique à l’intérieur. Pour assurer l’existence légale de cette chapelle, le fondateur prit soin de la faire admettre par l’Etat au rang des chapelles des secours . – (décret impérial du 17 Janvier 1857).

Comme il fait bon de prier dans ce sanctuaire recueilli et silencieux ! Il semble que Marie vous regarde amoureusement et qu’elle étende sa main pour vous bénir et vous défendre. Allez aux heures où le jour décline et vous y surprendrez d’humbles suppliants devant la Madone. Que de larmes séchées ! que de vœux exaucés ! Elle seule connaît tous les miracles de grâce qui se sont accomplis par sa puissante intercession.

La mot empêcha M. Durand de mettre la dernière main à son œuvre. Elle vint trop tôt l’enlever à l’affection de ses paroissiens qui le vénéraient comme un saint. Il semble qu’il eût mérité de reposer à l’ombre de ce sanctuaire que nous devons à son zèle et à ses généreuses offrandes. Dieu ne le permit pas.

Depuis 1861, époque à laquelle on élevé la flèche, rien n’a été fait pour l’achèvement du monument. Il reste quelques chapitaux à dégrossir à l’intérieur, et la façade extérieure attend le ciseau du sculpteur.

La neuvaine de prières se fait chaque année de l’Ascension à la Pentecôte, en même temps que celle de Miséricorde : le matin on y célèbre la messe, et le soir, à cause de l’enceinte trop étroite de la chapelle, une réunion nombreuse a lieu dans l’église paroissiale. Là, tous les cœurs ne formant qu’une voix, font monter leurs soupirs de cette vallée de larmes jusqu’au trône de Marie : exsules filii Evoe, ad te suspiramus, gementes et flentes in hâc lacrymarum valle . Le chant du Salve emprunte aux circonstances un charme tout nouveau : il semble que c’est un écho de ce cantique liturgique que les religieux Bénédictins exécutaient jadis après l’office du soir.

Pendant les 9 jours on expose à la vénération des fidèles la relique de la Sainte Vierge, une parcelle de son voile.

Chaque mois on se rendait processionnellement à la chapelle en chantant les Litanies, à la suite de l’étendard déployé de Bonne-Garde. Cette cérémonie qui avait lieu tous les premiers dimanches, est restée forcément interrompue pendant 8 ans : elle va devenir plus chère encore aux pieux habitants de St Jacques, heureux avec toute la Ville d’avoir recouvré la liberté des manifestations de la foi.

C’est à cette occasion et pour marquer la reprise de la chère procession de Bonne-Garde, que nous avons composé cette petite Notice et que nous la déposons au pied de l’antique statue, rendue au culte et à la vénération du peuple. Puisse la Madone bénir ces pages qui contribueront, il faut l’espérer, à la faire aimer davantage dans la paroisse St-Jacques, si fidèle et si dévouée.

 

    Se souvenir de moi     Mot de passe perdu